En début d’année, j’ai été contacté par Benoît Cailmail, Adjoint au Directeur du département de la Musique de la Bibliothèque nationale de France (BnF) pour envisager la conservation pérenne de la mémoire de la création musicale de la scène alternative française. Étant moi-même chercheur et historien j’ai immédiatement vu l’intérêt d’une telle proposition dans un but à la fois de transmission d’un savoir alternatif sur les plans textuels, graphiques, musicaux, visuels ou organisationnels mettant en œuvre le Do It Yourself auquel a fortement contribué Bérurier Noir mais aussi dans un but de recherche pour étudier les processus de la création musicale alternative en France dans les années 1980-1990.

Pour des raisons liées également à la conservation d’un patrimoine culturel qui a sa place dans les archives françaises, j’ai donc accepté de faire don à la collectivité et au service public d’un ensemble de collections concernant mes activités culturelles et musicales de 1977 à 2020. Cette longue période traverse l’existence de plusieurs groupes dans lesquels j’ai officié principalement en tant que chanteur et graphiste : Béruriers (1978-1982 [mon arrivée date de 1980]), Bérurier Noir (1983-1989 + 2003-2006), Molodoï (1990-1996), François Béru et les Anges Déchus (1998-2002) ainsi que diverses opérations musicales ou culturelles (Bagarre, Olympia 2019 ; exposition “24 Héroïnes électriques” 2020) sans oublier les labels Division Nada (1990-1992) et Folklore de la Zone Mondiale (FZM, 2003-2007) que j’ai soit dirigé soit porté collectivement. Il n’en reste pas moins que Bérurier Noir constitue 80% de l’ensemble du don. Il sera d’ailleurs enrichi par le don de Masto, artiste musicien et photographe dans diverses formations musicales, dont la plus emblématique, outre Bérurier Noir, reste Lucrate Milk (1979-1983).

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Le jeudi 17 juin 2021 à 9h30 ce sont ainsi 22 cartons de documentation (dont 51 boîtes archives, 6 classeurs concerts…), 6 caisses bleues fournies par la BnF (costumes, masques, objets), 7 cartons à dessins (maquettes, portraits, graphisme…), des rouleaux d’affiches, dessins, bâches… soit 41 “ensembles” manutentionnés directement par Benoît et Laurent de la BnF depuis leur zone de stockage à Lyon.

Ces ensembles, dûment emballés pour rejoindre Paris, vont de l’objet punk réalisé en 1977 à la production musicale sous toutes ses facettes (répétitions, concerts, tests pressing, productions et merchandising…) en passant par une riche iconographie (plus de 1500 photos pour l’ensemble des groupes dont 1200 pour Bérurier Noir). A ces ensembles est jointe une importante documentation culturelle et politique constituant l’humus de l’époque (squat, prisons, luttes alternatives, anarchisme, antifascisme, karaté, cinéma japonais…).

A bien des titres, cette documentation, qui a failli à plusieurs reprises disparaître et qui a traversé les océans, est exceptionnelle et bien conservée dans “son jus” d’origine sans dégâts majeurs.

En tant que donateur-acteur-chercheur, j’envisage une présentation détaillée du fonds lors d’une journée d’étude Bérurier Noir en 2022.

Ainsi, au delà de l’estampille personnelle FanXoa, les chercheurs et chercheuses du monde entier pourront avoir accès à une documentation plurielle dans sa forme (vinyles, dessins, partitions, textes, objets…) et riche dans sa complétude. Celle-ci est caractérisée par les imprimés politiques et culturels rares produits entre 1977 et les années 2000 qui offrent au fonds toute sa profondeur pour qui s’intéresse au contexte et aux sources d’inspiration de ce mouvement musical qui a marqué une bonne décennie la scène culturelle française et européenne.

Grâce à ce don et sa préservation sur le long terme par la BnF, la “musique savante” côtoyant déjà les “musiques actuelles” va désormais cohabiter avec la “musique alternative”, en réalité toute aussi savante sur le plan des idées que les autres.

FX, vendredi 18 juin 2021. MàJ 23/06/2021

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Illustration : Fanfan, autoportrait Samouraï Noir, 1985